Originaire de la région de La Roche sur Foron et de Bonneville en Haute Savoie, Serge Dégerine naît en 1948. Il fait ses études secondaires au Lycée Technique de Cluses. Il en héritera un esprit pragmatique et un gout pour les applications concrètes dont il ne se départira jamais. Il s’y fait remarquer pour ses aptitudes en mathématique et après le baccalauréat abandonne la filière technologique à laquelle il était destiné pour venir à l’université de Grenoble où il obtient une maîtrise de Mathématiques et Applications Fondamentales. Il s’oriente vers le domaine des probabilités et de la statistique pour préparer une thèse dans l’équipe dirigée par Jean-René Barra au sein du laboratoire LA7. Sa thèse, intitulée “Étude des structures statistiques liées aux lois de Von Mises” (*), est soutenue en 1975 et concerne, dans le cas le plus simple, des lois de probabilité sur le cercle généralisant la loi Gaussienne. Cette thèse lui permet d’obtenir un poste de Maitre Assistant à l’Université Pierre Mendès France (UPMF), i.e. l’Université des Sciences Sociales de Grenoble, dans le département Techniques de Commercialisation de l’IUT B.
Au département TC Serge s’investit pleinement. Il est convaincu de l’intérêt et de la spécificité de l’enseignement des mathématiques et de la statistique en sciences sociales. Avec son collègue Alain Delaye ils refondent totalement cet enseignement créant nombre de documents adaptés à ce public. Cela ne l’empêche pas de s’investir efficacement en recherche : durant cette période il développe des travaux dans le domaine des séries chronologiques qui seront le thème central de sa thèse d’État soutenue en 1988 et sur lesquelles il continue ensuite de travailler, en particulier avec les chercheurs dont il encadre les thèses.
Après 17 ans passés à l’IUT, en 1994 il est nommé professeur à l’UJF et peut alors se consacrer à la statistique aussi bien en enseignement qu’en recherche. Il conserve cependant des liens étroits avec l’UPMF. En particulier, il est régulièrement membre de la commission de spécialistes. Doué d’une puissance de travail très au dessus de la moyenne, il publie un nombre important d’articles, notamment avec les chercheurs qu’il encadre. Ses publications ont marqué par leur originalité et leur profonde rigueur. Il se fait une règle d’aller au fond de chaque problème auquel il s’attaque, quitte à réduire le nombre de publications qu’il aurait pu produire. Ses résultats ont été reconnus et appréciés par les personnalités internationales les plus importantes dans le domaine. Par ailleurs la préoccupation des applications et du concret ne le quitte pas. C’est ce qui le pousse à développer des travaux en théorie du signal et à établir des liens entre les statisticiens du LMC/LJK et la communauté des chercheurs en Traitement du signal aussi bien locale que nationale.
Comme enseignant, Serge a toujours été particulièrement apprécié des étudiants, qui, au-delà de la rigueur qu’il manifestait, savaient reconnaitre l’attention et l’affection profondes qu’il leur portait. Son sens des responsabilités et celui des rapports humains l’ont conduit à prendre en charge constamment de nombreuses tâches collectives, aussi bien en enseignement qu’en recherche. Il était homme de dialogue et dans une communauté agitée par les mutations en cours, il tenait constamment ce rôle, soucieux avant tout des individus et de la qualité des rapports humains. Sa porte était toujours ouverte.
Son temps de loisir, Serge le consacrait avant tout à sa famille, son épouse Chantal et ses enfants Barbara et Boris, et à ses amis. Il était musicien de cœur, n’hésitant pas à effectuer des déplacements pour aller écouter ses artistes et chanteurs préférés. Il était aussi un homme de nature et de grand air. En été il se ressourçait au lac de Monteynard : durant les vacances et les week-ends il avait l’habitude d’établir son camp de base au lac avec sa planche à voile et passait du temps à naviguer, à explorer les environs à vélo et à profiter des longues soirées conviviales entre amis.
Serge nous a quittés un dimanche de février 2008 alors qu’il faisait du ski avec ses enfants.
Gerard Grégoire